« « Même si le sanglier rougit de colère, la belette n’a pas l’air d’avoir peur.

En plus, j’ai un secret, Monsieur Zad.  Moi aussi, je parle aux arbres. »

« Tout le monde peut parler aux arbres s’il le veut, pauvre sotte. »

« Oui, mais à moi, ils répondent à chaque fois. »

Là, elle se met à fredonner, puis à chanter.  Zad soupire.

Sauf qu’elle fait, en même temps, un drôle de signe au bouleau le plus proche.

Presque aussitôt, les feuilles de cet arbre se mettent à vibrer.

Un bruit d’écorce résonne comme un rire ou un refrain.

L’arbre danse à sa façon.

« Voilà ce que je sais faire…Au revoir!  Ah, et je m’appelle Miss Angel!  Retiens ça, grand bougon! » »

Zad, le sanglier, vit seul en forêt. C’est un féroce défenseur des arbres qu’il respecte et admire. Cependant, il en va autrement avec les gens. Zad est en effet absolument insociable. Ainsi, lorsqu’Angel une belette s’immisce dans sa vie, il ne la perçoit que comme un problème.  Pourtant, la belette a bien des choses à lui apprendre et pas seulement au sujet des arbres. Grâce à cette rencontre, le sanglier libèrera une tendresse dormante en lui.

• Ce conte aborde à la fois la valorisation et la protection des arbres ainsi que l’ouverture à l’autre. Ces deux thèmes s’enrichissent mutuellement de manière très fine. Zad a la certitude d’être le seul à pouvoir protéger les arbres. Or, la belette intervient avec douceur et prône l’entraide, ce qui répugne à Zad. Le rapport à la nature et le rapport à l’autre, la nécessité de considérer les idées des autres pour protéger la nature, les valeurs d’entraide qui doivent primer sur toutes autres considérations pour un meilleur avenir : voilà quelques idées pouvant être dégagées de ce conte.
• La magie intervient régulièrement au fil de l’intrigue.  Elle prend la forme de mouvements, de force, d’éléments qui se déchaînent et aussi de mots racontés à la rivière et pouvant être saisis par la belette. Ces éléments extraordinaires embellissent le récit, plongeant le lecteur dans un univers merveilleux.
• Les personnages sont bien campés. Zad a un caractère détestable, il n’hésite pas à projeter des pommes de pin sur quiconque s’aventure dans les bois. Pourtant, il ressent un grand besoin d’amitié et de douceur. Le passage suivant l’exprime brillamment : « Je me sens si seul. J’ai besoin d’un ami.  De parler miel et non plus caillou ou pommes de pin.  Les arbres sont mes cousins d’écorce, mais je rêve d’avoir une famille. »
• Le grand format de l’album met en valeur les superbes illustrations de Poulin. Elles se déploient sur une page, souvent sur la double page ou dans des cadres ovales. Quel que soit l’espace qu’elles occupent, elles regorgent de détails qui plaisent à l’œil. Les mimiques et les postures de Zad et d’Angel sont mises en évidence, ce qui permet au lecteur de constater l’évolution de leur relation. 
• Deux doubles pages nécessitent de changer l’orientation de la lecture. Il s’agit de deux scènes où la verticalité prend tout son sens, car elles montrent des moments importants.  On remarquera aussi des jeux de lumière simulant un peu de brouillard au-dessus de la cime des arbres.  Les couleurs des feuilles d’automne, les teintes variées des vêtements de la belette et de ses amis ainsi que les tailles disproportionnées des animaux : tout participe à maintenir notre attention.
• Un très bel album qui nous rappelle qu’il importe de prendre soin autant des êtres humains que des arbres.